Etant donné le profil unique des membres du CCRE, à savoir des associations nationales de collectivités territoriales, il est intéressant d'examiner si certaines associations nationales étaient impliquées dans les réformes territoriales et si elles jouent un rôle dans l'orientation des discussions nationales sur cette question. Comme prévu, la nature et l'étendue de l'implication varient largement entre les associations membres du CCRE. De manière générale, les associations nationales ont joué un rôle aussi bien dans les premières phases de préparation et de planification (proposition d'idées, élaboration de plans, etc.) que dans les phases ultérieures (par exemple, promotion de la mise en œuvre de réformes territoriales parmi les unités de gouvernement local).

 

Que leur position soit ou non officiellement reconnue par les dispositions ou le cadre juridique d'un pays[1], les associations nationales sont des protagonistes indispensables pour faire avancer les développements liés aux réformes territoriales et de l'administration publique. La section suivante explore le rôle joué par les associations nationales pour soutenir la gouvernance en partenariat dans leur pays, en maximisant et en adaptant aux besoins spécifiques de leur pays les outils conçus pour favoriser la transformation territoriale, mais développés au niveau européen. Les associations nationales peuvent également jouer un rôle essentiel en stimulant les efforts de modernisation de la démocratie dans leur pays.

 

[1] Pour des informations plus détaillées, voir l'étude du CCRE sur les associations nationales de collectivités territoriales : CEMR_study_association_local_government_FR.pdf (ccre.org)

Maillon clé dans la chaîne de la gouvernance

Plusieurs exemples fournis par les membres du CCRE soulignent le rôle vital des associations nationales pour garantir des accords de partenariat efficaces. Leur contribution apporte une valeur ajoutée au fonctionnement de la gouvernance et fournit un soutien essentiel à l’échelon infranational.

 

En Géorgie, par exemple, l'Association nationale des pouvoirs locaux (NALAG) a joué un rôle central dans le processus de décentralisation, qui mettra progressivement en œuvre des réformes de dévolution des pouvoirs au cours des deux prochaines années. NALAG est l'une des deux seules institutions, l'autre étant le Ministère du développement régional et des infrastructures de Géorgie (MRDI), actrices de l'avancement des processus de réforme.

 

Il existe des cas, comme celui de l’association des comtés croates (CCA), où les associations nationales remplissent une importante fonction de coordination entre le gouvernement central et les collectivités territoriales. La CCA a été un intermédiaire clé et a défendu les intérêts des comtés croates dans les discussions avec le gouvernement central pendant la phase de préparation et de coordination de leur réforme territoriale. De même, au Portugal, l'Association nationale des municipalités (ANMP) a négocié avec le gouvernement central et est parvenue à un consensus sur tous les textes juridiques sectoriels, assurant ainsi la cohérence de la décentralisation en cours dans les différents secteurs de l'administration publique.

 

En Lettonie, l'Union des gouvernements locaux et régionaux (LALRG) a joué un rôle important pour garantir la place et la contribution des points de vue des collectivités territoriales dans les discussions avec le gouvernement national. Des détails supplémentaires sont fournis dans la section suivante sur la Charte Européenne de l’Autonomie Locale.

 

Les associations nationales peuvent véritablement exceller dans leur rôle de partenaire indispensable dans les discussions avec les gouvernements centraux, comme le montre le cas de la Conférence permanente des villes et des municipalités (SCTM), qui représente les villes et municipalités de Serbie. Ces associations sont considérées comme des partenaires gouvernementales pour la préparation de la stratégie, de la politique et de la mise en œuvre de la législation. En même temps, la SCTM défend toujours les besoins de ses membres selon les résultats de son travail consultatif et analytique. Elle mène également diverses activités de renforcement de capacités avec les collectivités territoriales, dont des activités de formation.

La Charte européenne de l'autonomie locale

La Charte européenne de l'autonomie locale[1] (la Charte européenne) est un instrument juridiquement contraignant qui a été adopté par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe (CPLRE). Son objectif est de garantir l'indépendance politique, administrative et financière des collectivités territoriales. Plusieurs associations se sont inspirées de la Charte européenne pour initier des réformes territoriales au niveau national.

 

La Charte européenne s'est souvent avérée très utile pour garantir que les associations de collectivités territoriales obtiennent une place dans les discussions nationales. Par exemple, l'Union des gouvernements locaux et régionaux de Lettonie (LALRG) a su avantageusement s’en servir en citant les dispositions de l'Article 5 afin de participer pleinement aux pourparlers et aux discussions sur la réforme territoriale à tous les stades. Cela lui a même permis d’influencer l'avis du Congrès des collectivités territoriales et de participer avec succès aux discussions avec les ministres avant les lectures parlementaires et devant la Cour constitutionnelle.

 

En Écosse, la Charte européenne de l'autonomie locale a été transposée en mars 2020 par une loi du Parlement écossais, faisant de l'Écosse la seule juridiction du Royaume-Uni à disposer de protections juridiques détaillées sur le droit à l'autonomie locale.

 

Ces exemples mettent en évidence la capacité des associations nationales à défendre l'application correcte de la Charte européenne et les intérêts des collectivités territoriales lors de réformes.

Réviviscence de la démocratie locale

Les associations nationales jouent souvent un rôle central dans les efforts de modernisation de la démocratie, tout en défendant les droits et les intérêts des gouvernements infranationaux, afin qu'ils ne soient pas négligés dans le processus d'avancement des réformes territoriales.

 

Le rôle proactif de l'Association nationale des municipalités de la République de Bulgarie (NAMRB) constitue un bon exemple de la manière dont les associations nationales peuvent servir de catalyseur d'action et de changement. En août 2020, la NAMRB a pris l'initiative de relancer le Conseil pour la décentralisation de la gouvernance de l'État, dont les travaux avaient été interrompus pendant une période de plus de quatre ans. Lors de sa première réunion, il a été décidé d'actualiser la Stratégie de décentralisation de la gouvernance de l'État 2016-2025[1] et d'élaborer une feuille de route pour sa mise en œuvre à partir de 2021-2025. Un groupe de travail a été créé pour préparer les projets de textes, et les principales propositions de la NAMRB ont été incluses dans les textes.

 

On peut trouver de nombreux autres exemples d'associations nationales qui soutiennent et facilitent la modernisation de la démocratie, y compris des cas récents au Royaume-Uni. Au cours des quatre dernières années, la Convention des autorités locales écossaises, COSLA, a procédé à un examen de la gouvernance locale avec le gouvernement écossais. Il s'agissait d'un exercice de grande envergure impliquant les deux échelons de gouvernement, ainsi que le milieu universitaire et des groupes civiques. Cette collaboration a mis en évidence le désir d'une démocratie moderne revigorée dans toute l'Écosse, capable de s'attaquer à des questions telles que la réduction des inégalités et la redistribution du pouvoir et des ressources au sein du système de gouvernance britannique. Une adoption réussie de cette législation donnerait à l'Écosse, pour la première fois, le pouvoir d'exercer légalement les principes de la Charte européenne de l'autonomie locale.  

 

L'objectif de la Loi sur le gouvernement local et les élections (Pays de Galles) de 2021 est de réformer les dispositions électorales pour les gouvernements locaux et de promouvoir la participation du public à la démocratie locale. L'Association des gouvernement locaux gallois (WLGA) a joué un rôle actif dans l'élaboration de cette nouvelle législation. Des membres élus et des hauts fonctionnaires de toutes les collectivités locales galloises ont participé à un engagement de haut niveau avec le gouvernement gallois tout au long du processus d'élaboration de la loi. Un certain nombre de groupes de travail ont été organisés pour s'assurer que la législation était élaborée et conçue avec la participation des autorités locales.

 

Ces exemples fournis par les membres du CCRE démontrent la variété des rôles joués par les associations nationales pour façonner les réformes territoriales et leurs résultats, et pour faire progresser la démocratie dans leurs pays.